Comment entendre l’enfant dans les processus amiables ?
Publié le :
26/07/2018
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Un colloque inédit le 21 novembre 2018 de 14h à 18h par l’IDFP sur « S’adresser à l’enfant et recueillir sans parole dans les MARD* »
* Modes Amiables de Résolution des Différends
Le divorce sans juge en vigueur en France depuis 2017 a suscité de nombreuses questions quant à la protection de l’enfant.
L’enfant a le droit d’être entendu par un juge pour être protégé et que ses sentiments soient recueillis. Il a le droit d’être associé aux décisions qui le concernent. Les décisions doivent être prises dans son intérêt dit « supérieur » c’est-à-dire qu’il prime celui des parents. Il a le droit d’entretenir des relations avec ses deux parents et ses grand-parents. Les parents ont le devoir de pourvoir à sa santé, sa sécurité, son éducation, sa moralité. L’intervention du juge présente une garantie du respect de ces droits.
Avant la réforme, les divorces amiables « par consentement mutuel » étaient formalisés par une convention rédigée par un ou deux avocats, soumise au contrôle du Juge aux Affaires Familiales. Le juge du divorce entérinait les conventions dès lors qu’elles étaient suffisamment équilibrées entre les époux mais aussi respectueuses de l’intérêt supérieur de l’enfant. On disait que les avocats travaillaient « sous l’ombre portée du juge ».
Le législateur a supprimé la case « Tribunal » de ces divorces pour accompagner le mouvement social de dérégulation des relations familiales, et pour désengorger les tribunaux. Cette réforme très positive fut rédigée et entérinée très vite et nos parlementaires se sont demandés sans grand débat quelle solution adopter pour protéger l’enfant de conventions inadéquates dès lors qu’un juge n’intervient plus ?
Ils ont imaginé un « formulaire » à faire obligatoirement signer par les enfants « en âge de discernement » destiné à informer l’enfant de son droit à être entendu par un juge s’il a besoin que le divorce de ses parents soit contrôlé par ce dernier : parce qu’il subit des violences, parce qu’il est en désaccord avec ce que ses parents auraient prévu. Le notaire chargé d’enregistrer la convention rédigée par les avocats a le devoir de s’assurer que le formulaire a été présenté par les parents et signé par les enfants.
La circulaire explicative de la nouvelle loi précise:
« Il existe deux hypothèses pour l’enfant capable de discernement :
- soit il sait lire et le formulaire complète alors l’information dispensée par les parents ;
- soit il ne sait pas lire et il revient alors à ses parents de le lui lire et de lui expliquer les mentions en termes compréhensibles, en fonction de sa maturité. »
La profession d’avocat s’est indignée de la froideur de ce formulaire et de l’épreuve infligée aux enfants d’avoir à signer un document officiel annexé à la convention de divorce, mêlant au premier plan l’enfant à cette procédure déjà assez douloureuse. Elle a pointé son inefficacité car quel enfant aura la liberté de demander son audition dès lors que ce sont ses parents qui lui présentent le formulaire ?
Une plainte a ainsi été déposée devant la Commission européenne pour que le divorce sans juge soit réservé aux familles sans enfants mineurs, estimant que ce cadre législatif ne respecte pas les droits fondamentaux de l’enfant.
Certains avocats, souhaitant s’impliquer dans la protection des enfants, les ont reçu en leur cabinet pour leur présenter le formulaire et recueillir leurs sentiments. Ce fut l’objet de débats et critiques. Ces avocats conseils des parents ne sont-ils pas en conflit d’intérêt avec eux ? Qu’en est-il du secret professionnel vis-à-vis des clients et de l’enfant ? Ces avocats sont-ils compétents pour procéder à cette entrevue ?
Je me suis alors interrogée sur la place de l’enfant dans les processus amiables. J’ai constaté qu’il n’existe aucun cadre amiable pour le recueil de la parole de l’enfant. Très peu de professionnels (médiateurs, avocats, magistrats) y sont formés, aucun texte ne le prévoit.
Dès lors, pour intégrer l’enfant aux processus amiables de résolution des crises familiales plusieurs questions ont émergé. Qui peut entendre l’enfant ? Pour quoi faire ? Dans quelles conditions ? Selon quelles règles légales et déontologiques ?
J’ai alors proposé à l’IDFP l’organisation d’un colloque sur le recueil de la parole de l’enfant dans les MARD.
Un groupe de travail s’est rapidement constitué avec moi :
- Fadéla HOUARI : avocat spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, défenseur d’enfants en intégration à l’antenne des mineurs ;
- Isabelle COPE-BESSIS, avocat spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, médiatrice formée à l’écoute des adolescents ;
- Jocelyne DAHAN, formatrice et médiatrice notamment à la Ligue Française de Santé Mentale et formée à l’écoute des enfants et adolescents ;
- Danièle GANANCIA, magistrat honoraire ancienne Juge aux Affaires Familiales et médiatrice familiale ;
- Marc JUSTON, magistrat honoraire, ancien Juge aux Affaires Familiales, membre du Haut Conseil de la Famille ;
- Et bien sûr moi-même, avocat spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, médiateur agréé CNMA formée à l’écoute des adolescents.
Nous avons cherché à tracer un cadre extra-judiciaire et une pratique professionnelle pour offrir aux enfants et à leurs parents la possibilité d’une information donnée et d’une parole recueillie dans la sécurité d’un cadre confidentiel, par des professionnels compétents, dans le respect de la loi.
Il n’est en aucun cas question de substituer une écoute privée à l’audition par le juge, qui est un droit fondamental. Mais d’offrir aux parents et aux enfants un espace pour que l’enfant puisse être associé aux décisions qui le concernent, qu’il soit informé de ses droits, que son intérêt soit analysé au plus juste, que les relations parent-enfants abîmées par la crise familiale soient éventuellement restaurées, et un moment de détection de situations où l’audition par un juge s’avérerait souhaitable.
Venez en débattre avec nous le 21 novembre !
Programme et inscription ici
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