Epouse et concubine – même si tu me trompes je te garde
Publié le :
03/05/2016
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Cour d’Appel de VERSAILLES, Chambre 2 Section 2, 7 janvier 2016, n° 14/07589
Un arrêt de la Cour d’Appel de VERSAILLES refuse à un mari infidèle le droit de divorcer en considérant que le fait qu’il ait quitté son épouse pour vivre avec une autre femme ne saurait démontrer de façon non équivoque sa volonté de rompre la relation conjugale avec son épouse.
Non ?! Si !!
Je sais, ça fait drôle. Quand ma journée commence avec ce genre de nouvelle, je ne sais pas si j’ai envie de rire ou de pleurer. Examinons la décision – elle n’est pas publiée et je ne peux pas la retranscrire ici.
Monsieur s’était effectivement installé avec une autre femme, appelée dans le jargon des magistrats versaillais « concubine », terme tout à la fois juridique et sulfureux pour désigner « l’autre femme », amante, maîtresse, compagne, amour…
Ils vivaient ensemble depuis 2009. Monsieur et Madame Epoux avaient toutefois pris soin de continuer à remplir leurs devoirs de parents dans la meilleure intelligence possible. C’est ainsi qu’à compter de 2009, tout en vivant avec Concubine, Monsieur l’Epoux rendait régulièrement visite à sa famille, notamment aux anniversaires des enfants et à Noël, et continuait avec Madame de gérer le patrimoine familial en « bon père de famille ».
Les trois enfants ayant au moment de l’arrêt respectivement 22, 25 et 28 ans, j’en déduis qu’ils avaient au moment de la séparation, 15, 18 et 21 ans.
Assez logiquement, Monsieur l’Epoux décidait début 2011 de clarifier sa situation et d’entamer une procédure de divorce – requête en divorce donnant lieu à une ordonnance de non-conciliation du 26 mai 2011, puis assignation en divorce du 21 novembre 2012 donnant lieu à un jugement du 25 septembre 2014 du Juge aux Affaires Familiales de VERSAILLES : jugement où sa demande de divorce était rejetée.
Madame l’Epouse ne se plaignait pas en effet de la présence de Concubine et expliquait aux Juges que la double vie de son mari ne l’empêchait nullement d’aimer sa femme – quoiqu’il prétende le contraire, puisqu’ils souriaient sur les photos des anniversaires et de Noël, et que le jardinier témoignait qu’il se comportait toujours en époux aimant puisqu’il les avait vus au petit déjeuner en peignoir !
(Ca ne vous fait pas penser à Desperate Housewife ?).
Comme Monsieur n’avait aucune faute à faire valoir à l’encontre de son épouse, et qu’il ne prouvait soi-disant pas que le lien avec celle-ci était « définitivement altéré » depuis plus de deux ans puisque Madame soutenait qu’il l’aimait encore, le divorce ne pouvait être accordé d’un point de vue juridique (ou plutôt, judiciaire).
Et le premier juge, suivi par la Cour – soit au total quatre magistrats de VERSAILLES – de refuser à Monsieur de se libérer de son mariage pour vivre sa vie dans la clarté et la liberté !
Curieuse décision, spécialement venant de VERSAILLES que je croyais être une ville plus protectrice de la « moralité » que cela ! A moins que… ce ne soit justement révélateur de la mentalité d’une vieille France qui considère en somme qu’un époux peut avoir une double vie sans que cela ne lui donne le droit de se défaire d’un engagement conjugal.
Quand je lis des décisions pareilles, j’hésite entre les borborygmes du Capitaine Haddock, les extravagances du Professeur Tournesol ou les bégaiements de Dupont et Dupond…
Au XXIème siècle, refuser le divorce à un époux persévérant après 5 ans de procédure est indigne d’une juridiction de notre pays. Cela ne vaut pas mieux que les répudiations du passé.
Historique
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